L’Initiative pour les droits humains au Burundi

Ivyatangajwe n'amakete yabiherekeje

Communication à l’attention de l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme (GANHRI)

Le manque d’indépendance de la Commission nationale indépendante des droits de l’homme du Burundi mérite d’être examiné

Cher Dr. Ammar Dweik,

L’Initiative pour les droits humains au Burundi (IDHB) et Human Rights Watch sont profondément troublées par le manque d’indépendance, de crédibilité et d’efficience de la Commission nationale indépendante des droits de l’homme du Burundi (CNIDH).

En vue des préoccupations décrites ci-dessous et de celles exprimées par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le Burundi et du Comité des droits de l’homme des Nations Unies concernant le travail de la CNIDH ainsi que son manque d’indépendance, nous ne considérons pas que la CNIDH respecte pleinement les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (« Principes de Paris »). Nous recommandons donc que le Sous-Comité d’accréditation (SCA) reconsidère le statut A de la CNIDH en amont de son prochain examen prévu en .

BURUNDI : DE NOUVEAUX APPELS À LA LIBÉRATION D’UNE JOURNALISTE, UN AN APRÈS SON ARRESTATION

Les autorités burundaises devraient ordonner la libération immédiate et sans condition et annuler la condamnation de Floriane Irangabiye, arrêtée arbitrairement le et qui purge actuellement une peine de 10 ans d’emprisonnement pour avoir critiqué le gouvernement, ont déclaré Amnesty International, l’Initiative pour les droits humains au Burundi, le Comité pour la protection des journalistes et Human Rights Watch.

Burundi : Il faut renouveler le mandat du Rapporteur spécial et garantir des ressources financières adéquates

À l’attention des Représentants permanents des États Membres et Observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (Genève, Suisse)

Madame, Monsieur le Représentant permanent,

Lors de la 51ème session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, en , le Conseil a renouvelé le mandat du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Burundi, qu’il avait créé un an plus tôt, lors de sa 48ème session. Il a exprimé sa profonde préoccupation concernant les violations et atteintes aux droits de l’homme commises au Burundi et regretté le manque de coopération du Gouvernement burundais avec les organes et mécanismes dédiés aux droits humains.

BURUNDI : Libérez cinq défenseurs des droits humains

Les charges à leur encontre devraient être abandonnées et la répression de la société civile cesser

Les autorités burundaises devraient immédiatement et sans condition remettre en liberté cinq défenseurs des droits humains arrêtés arbitrairement le et abandonner les charges sans fondement qui pèsent sur eux, ont déclaré aujourd’hui Amnesty International, l’Initiative pour les droits humains au Burundi et Human Rights Watch.

Les cinq défenseurs des droits humains sont accusés de rébellion ainsi que d’atteinte à la sûreté intérieure de l’État et au bon fonctionnement des finances publiques. Les accusations ne semblent s’appuyer que sur leur relation avec une organisation internationale étrangère et le financement qu’ils ont reçu de sa part. Deux des défenseurs travaillent pour l’Association des femmes juristes du Burundi (AFJB) et les trois autres pour l’Association pour la paix et la promotion des droits de l’Homme (APDH).

« L’arrestation des cinq défenseurs des droits humains et les graves accusations portées à leur encontre témoignent d’une détérioration du contexte dans lequel évolue la société civile indépendante au Burundi », a constaté Clémentine de Montjoye, chercheuse au sein de la division Afrique de Human Rights Watch. « Si travailler en partenariat avec des organisations internationales ou recevoir des fonds de leur part sont désormais considérés comme des infractions pénales et une menace pour la sécurité de l’État, le peu d’espace qui restait à la société civile pour travailler au Burundi disparaitra. »

Le , le ministre de l’Intérieur, du Développement communautaire et de la Sécurité publique, Martin Niteretse, a accusé les organisations de collaborer avec une organisation non gouvernementale internationale.

Le , des agents du service de renseignement ont arrêté quatre des défenseurs (Sonia Ndikumasabo, présidente de l’AFJB, et Marie Emerusabe, sa coordinatrice générale ; Audace Havyarimana, représentant légal de l’APDH, et Sylvana Inamahoro, sa directrice exécutive), à l’aéroport Melchior Ndadaye de Bujumbura, alors qu’ils s’apprêtaient à prendre l’avion pour l’Ouganda pour une réunion avec des partenaires.

Prosper Runyange, coordinateur du projet d’appui à la gestion foncière pour l’APDH, a été arrêté à Ngozi le et transféré à Bujumbura le jour suivant. Les cinq défenseurs ont été détenus au siège du Service national de renseignement (SNR) à Bujumbura, puis transférés à la prison centrale de Mpimba à Bujumbura, le . Le , le Tribunal de grande instance de Ntahangwa, toujours à Bujumbura, a confirmé leur détention préventive.

Le ministre Martin Niteretse a déclaré aux médias : « Le dossier est en cours. Les résultats dont nous disposons pour le moment montrent qu’il y a une grande probabilité qu’il y ait risque de financement du terrorisme à travers ces fonds-là. On doit être vigilant sur tous les points pour que rien ne vienne perturber la paix et l’ordre public. » En vertu des normes et du droit international des droits humains, la recherche, l’obtention et l’utilisation de ressources financières, y compris celles issues de sources étrangères et internationales, sont une composante essentielle du droit à la liberté d’association. Les restrictions injustifiées des ressources disponibles pour les organisations ont un impact négatif sur le droit à la liberté d’association.

Les deux organisations, qui travaillent sur les violences fondées sur le genre et les droits fonciers, sont officiellement agréées au Burundi. Elles aident certaines des catégories les plus marginalisées de la société burundaise. La décision des autorités judiciaires de maintenir les poursuites contre les défenseurs, apparemment au seul motif que leurs organisations ont noué un partenariat avec une organisation internationale qui les finance, a déclenché la crainte d’une nouvelle vague de répression de la société civile au Burundi et décrédibilise le programme de réformes annoncé par le président, ont souligné les trois organisations internationales.

En , les autorités ont suspendu les activités de la plupart des organisations étrangères au Burundi, et les ont contraintes à se réenregistrer, notamment en présentant des documents indiquant l’appartenance ethnique de leurs employés burundais.

La politique du gouvernement, basée sur une loi sur les organisations non gouvernementales étrangères, adoptée en , a poussé certaines organisations internationales à fermer leurs bureaux au Burundi parce qu’elles étaient en désaccord avec les quotas ethniques imposés par le gouvernement et avec l’obligation de fournir des informations sur l’appartenance ethnique des membres de leur personnel. Certaines ont dit craindre que la communication de ces informations n’expose leurs employés à un risque de profilage et de ciblage ethnique.

« Les accusations d’atteintes à la sûreté de l’État et de rébellion portées à l’encontre de ces cinq défenseurs des droits humains sont absurdes », a tranché Carina Tertsakian, de l’Initiative pour les droits humains au Burundi. « Si les autorités ont des questions sur leurs sources de financement, elles peuvent y trouver des réponses par les voies administratives normales, comme le prévoit la loi. »

De à , pendant le troisième et dernier mandat du feu président Pierre Nkurunziza, la société civile et les médias indépendants ont souvent été pris pour cible et leurs membres ont été attaqués, disparus de force, détenus et menacés. Des dizaines de défenseurs des droits humains et de journalistes ont fui le pays et nombre d’entre eux sont toujours en exil. Ces crimes ont bénéficié d’une impunité quasi-totale.

Depuis l’arrivée au pouvoir en du président Évariste Ndayishimiye et malgré ses promesses de rétablir la liberté d’expression et d’association, l’hostilité du gouvernement à l’égard de la société civile et des médias burundais, autrefois florissants, demeure. L’arrestation des cinq défenseurs des droits humains fait suite à la condamnation, le , d’une journaliste en ligne, Floriane Irangabiye, à 10 ans de prison pour « atteinte à l’intégrité du territoire national », en violation de ses droits à la liberté d’expression et à un procès équitable.

Ces dernières arrestations, ainsi que la condamnation de Floriane Irangabiye mettent fin à une brève période d’optimisme suite à l’acquittement et la libération, en , de Tony Germain Nkina, avocat et ancien défenseur des droits humains qui a passé plus de deux ans injustement emprisonné pour des accusations infondées de collaboration avec un groupe rebelle. Douze défenseurs des droits humains et journalistes en exil ont été condamnés en pour avoir participé à une tentative de coup d’État en . Le verdict, qui n’a été rendu public qu’en , a été prononcé à l’issue d’un procès entaché de graves irrégularités, au cours duquel les accusés étaient absents et ne disposaient pas de représentation légale, au mépris des principes les plus élémentaires d’une procédure régulière. Les 12 accusés ont été reconnus coupables d’« attentat à l’autorité de l’État » d’« assassinats » et de « destructions ».

L’arrestation de Sonia Ndikumasabo, Marie Emerusabe, Audace Havyarimana, Sylvana Inamahoro et Prosper Runyange semble avoir pour but de punir les défenseurs des droits humains et leurs organisations pour avoir coopéré avec une organisation internationale, d’entraver les activités de leurs organisations et d’intimider d’autres activistes. Un tel acte contredit les affirmations des autorités burundaises selon lesquelles elles respectent les droits humains et ternit davantage l’image d’ouverture et de réforme qu’elles tentent de projeter à l’échelle internationale, selon les trois organisations internationales.

« Les actions parlent plus que les mots, » a déclaré Flavia Mwangovya, directrice régionale adjointe à Amnesty International. « Si les autorités burundaises veulent que leurs promesses en matière de droits humains soient prises au sérieux, elles doivent permettre à la société civile de faire son précieux travail, notamment défendre et aider les victimes de violations des droits humains, sans être harcelée. »

BURUNDI : IL FAUT RENOUVELER LE MANDAT DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

À l’attention des Représentants permanents des États Membres et Observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (Genève, Suisse)

Madame, Monsieur le Représentant permanent,

En , lors de la 48ème session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, ce dernier a institué une procédure spéciale sur le Burundi. Le nouveau mandat de Rapporteur spécial comprend d’importantes composantes de suivi de la situation et de fourniture de rapports et de conseils techniques. En même temps, la décision du Conseil de ne pas renouveler le mandat de la Commission d’enquête (COI) a mis fin au seul mécanisme international chargé d’enquêter sur les violations et atteintes aux droits humains au Burundi et d’identifier leurs auteurs en vue d’assurer la pleine reddition des comptes. Dans ce contexte, alors que de graves inquiétudes demeurent quant au respect des droits, il est crucial que le Rapporteur spécial puisse mener à bien sa mission.

DEMANDE DE L’APPLICATION IMMÉDIATE DES DÉCISIONS DE JUSTICE ORDONNANT LA LIBÉRATION SANS DÉLAI DE CHRISTA KANEZA

À Madame Domine Banyankimbona, Ministre de la Justice

Madame la Ministre,

Nous, les organisations non gouvernementales de défense des droits humains soussignées, vous demandons, en votre qualité de ministre de la Justice, d'appliquer sans plus attendre les décisions de justice accordant la liberté provisoire à Christa Kaneza. La non-application de ces décisions est un affront à l'état de droit et constitue une violation de son droit à un procès équitable garanti par l'article 38 de la Constitution burundaise, l'article 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel votre pays est partie.

Christa Kaneza, âgée de 19 ans et mère d'un enfant d'un an, a été arrêtée le suite à l’homicide de son mari Thierry Kubwimana le . Il a été tué chez lui, à Gasekebuye, une banlieue de la capitale économique, Bujumbura. Depuis, Christa Kaneza est détenue à la prison centrale de Mpimba, à Bujumbura.

Décision choquante : la cour d’appel maintient la condamnation de l’avocat Tony Germain Nkina

Six organisations internationales de défense des droits humains – Amnesty International, DefendDefenders (le Projet des défenseurs des droits humains de l’Est et de la Corne de l'Afrique), Human Rights Watch, l’Initiative pour les droits humains au Burundi, Protection International Africa et TRIAL International – ont dénoncé la décision de la Cour d’appel de Ngozi le de maintenir la condamnation et la peine de cinq ans d’emprisonnement de l’avocat burundais Tony Germain Nkina, suite à un procès inéquitable.

« Le procès de Tony Germain Nkina était une parodie de justice », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale à Human Rights Watch. « La décision de la Cour d’appel de le maintenir en prison, malgré d’abondantes preuves de l’iniquité du procès, fait une mascarade du système judiciaire burundais. »

Les organisations sont convaincues que Tony Germain Nkina, avocat dans la province de Kayanza, a été arrêté et condamné à cause de son ancienne affiliation à l’Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH), l’une des principales organisations de défense des droits humains au Burundi jusqu’en .

Tony Germain Nkina était le représentant de l’APRODH à Kayanza jusqu’à ce que l’organisation soit suspendue par le gouvernement en dans le contexte d’une répression généralisée contre la société civile. Il n’a pas travaillé pour l’APRODH ni pour aucune autre organisation de la société civile burundaise depuis six ans.

Tony Germain Nkina a été arrêté le dans la commune de Kabarore, où il rendait visite à un client dans le cadre de ses activités professionnelles en tant qu’avocat. En , le tribunal de grande instance de Kayanza l’a déclaré coupable de collaboration avec des groupes armés – une accusation fréquente contre des présumés opposants et détracteurs au Burundi – et l’a condamné à cinq ans d’emprisonnement. Son client, Apollinaire Hitimana, qu’il conseillait dans le cadre d’un conflit foncier, a été reconnu coupable de complicité à la même infraction, et condamné à deux ans et demi d’emprisonnement. La Cour d’appel a également maintenu la condamnation et la peine d’Apollinaire Hitimana.

L’audience à la Cour d’appel de Ngozi, prévue pour le , a été reportée à deux reprises et a finalement eu lieu le . Le parquet n’a pas avancé de preuves crédibles contre Tony Germain Nkina et aucun témoin à charge n’était présent. Tony Germain Nkina et ses avocats ont pu démontrer qu’il avait visité Kabarore pour des raisons professionnelles légitimes. Malgré cela, le tribunal a confirmé sa condamnation dans un jugement prononcé très rapidement.

« La condamnation de Tony Germain Nkina est une nouvelle tache sur le bilan du Burundi en matière des droits humains, alors que le gouvernement essaie d’améliorer son image », a déclaré Deprose Muchena, directeur pour l’Afrique de l’est et l’Afrique australe à Amnesty International. « Si les autorités burundaises veulent convaincre le public national et international que leur système judiciaire est crédible, elles devraient abandonner toutes les charges contre Tony Germain Nkina et le libérer immédiatement. »

Alors que le dialogue entre l’Union européenne (UE) et le Burundi progresse, avançant vers une reprise possible de la coopération, l’UE et ses États membres devraient indiquer clairement au président Évariste Ndayishimiye que ses promesses de respecter les droits humains et de réformer le système judiciaire ne peuvent pas être prises au sérieux tant que Tony Germain Nkina reste en prison uniquement à cause de ses activités passées en faveur des droits humains.

La manière dont Tony Germain Nkina a été ciblé, ainsi que sa condamnation et sa peine, sont emblématiques de la situation généralisée des droits humains au Burundi où l’espace pour la société civile et les médias reste très restreint, ont affirmé les organisations. D’autres gouvernements, ainsi que des représentants et organes des Nations Unies, l’Union africaine et d’autres entités internationales, devraient également dénoncer la condamnation de Tony Germain Nkina et demander sa libération immédiate.


Pour de plus amples informations sur le cas de Tony Germain Nkina et d’autres défenseurs des droits humains au Burundi, veuillez lire le communiqué conjoint des six organisations de défense des droits humains publié le  : « Burundi : Libérez l’avocat Tony Germain Nkina ».

Burundi : liberéz l’avocat Tony Germain Nkina

Les autorités burundaises devraient libérer immédiatement et sans conditions l’avocat Tony Germain Nkina, condamné à cinq ans d’emprisonnement en , très probablement à cause de ses activités passées en faveur des droits humains, ont déclaré aujourd’hui six organisations internationales de défense des droits humains.

Les organisations – Amnesty International, DefendDefenders (Projet des défenseurs des droits humains de l’Est et de la Corne de l’Afrique), Human Rights Watch, l’Initiative pour les droits humains au Burundi, Protection International Africa et TRIAL International – sont convaincues que le motif probable de l’arrestation de Tony Germain Nkina est son ancienne affiliation à l’Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH), l’une des principales organisations de défense des droits humains au Burundi jusqu’en .

Les poursuites contre Tony Germain Nkina et son emprisonnement servent de rappel inquiétant des risques qui pèsent toujours sur ceux qui faisaient partie du mouvement des droits humains au Burundi, autrefois très dynamique. Les autorités burundaises devraient démontrer leur engagement à la protection des droits humains en libérant immédiatement Tony Germain Nkina et en abandonnant les charges contre lui. Les partenaires internationaux du Burundi devraient soutenir les appels à sa libération.

Tony Germain Nkina, avocat dans la province de Kayanza dans le nord du Burundi, a été arrêté le dans la commune de Kabarore, où il rendait visite à un client dans le cadre de ses activités professionnelles. Il a été brièvement détenu par le service de renseignement à Kayanza, puis transféré à la police, et enfin à la prison de Ngozi, où il est actuellement détenu.

Le mois d’ a été une période tendue à Kayanza suite à des attaques par un groupe armé dans les semaines précédentes, lors desquelles plusieurs personnes ont été tuées ou enlevées. Tony Germain Nkina visitait Kabarore, l’une des localités affectées, peu de temps après ces attaques. Les autorités l’ont accusé de collaborer avec le groupe d’opposition armé RED-Tabara (Mouvement de la résistance pour un état de droit au Burundi), auquel elles attribuent ces attaques, et l’ont inculpé pour atteinte à la sûreté intérieure de l’État.

Le , le tribunal de grande instance de Kayanza a déclaré Tony Germain Nkina coupable de « collaboration avec les rebelles qui ont attaqué le Burundi » et l’a condamné à cinq ans d’emprisonnement et une amende d’un million de francs burundais (environ 500 dollars US). Son client, Apollinaire Hitimana, qu’il conseillait dans le cadre d’un conflit foncier et qui a été arrêté avec lui, a été déclaré coupable de complicité à la même infraction et condamné à deux ans et demi d’emprisonnement et une amende de 500 000 francs burundais. Une audience en appel est prévue le à la cour d’appel de Ngozi.

Tony Germain Nkina était le représentant de l’APRODH à Kayanza jusqu’à ce que l’organisation soit suspendue par le gouvernement en dans le contexte d’une répression généralisée contre la société civile, suite à un mouvement d’opposition à la décision du président Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat controversé. Tony Germain Nkina n’a pas travaillé pour l’APRODH ni pour aucune autre organisation de la société civile burundaise depuis six ans. Il est un avocat bien connu à Kayanza et membre du barreau de Gitega. Toutefois, les autorités à Kayanza pourraient toujours l’associer à l’APRODH, tout particulièrement parce qu’il conduisait son ancienne moto de l’APRODH le jour de son arrestation.

Le procureur l’a accusé, entre autres, d’être allé au Rwanda pour livrer des informations au président de l’APRODH, Pierre Claver Mbonimpa, qui vit en Europe, ainsi qu’à RED-Tabara. Le procureur n’a présenté aucune preuve pour justifier ces allégations.

Tony Germain Nkina serait le seul ancien membre d’une organisation des droits humains actuellement emprisonné au Burundi. Deux autres défenseurs des droits humains ont été libérés plus tôt en .

Contexte

L’APRODH était l’une des organisations de défense des droits humains les plus actives et les mieux connues au Burundi. Pierre Claver Mbonimpa a échappé de justesse à une tentative d’assassinat en avec des blessures qui auraient pu être fatales. Le fils et le gendre de Pierre Claver Mbonimpa ont tous les deux été abattus en .

Le représentant de l’APRODH dans la province de Gitega, Nestor Nibitanga, a été arrêté en et condamné en à cinq ans d’emprisonnement pour des infractions similaires à celles formulées contre Tony Germain Nkina. Il a été libéré en dans le cadre d’une mesure de grâce accordée à plus de 5 000 prisonniers par le président Évariste Ndayishimiye.

Un autre défenseur des droits humains, Germain Rukuki, a été arrêté en et condamné à 32 ans d’emprisonnement en sur la base d’accusations fabriquées, liées à son travail en faveur des droits humains. Sa peine a été confirmée par la Cour d’appel en , mais par la suite, la décision de la Cour d’appel a été annulée par la Cour suprême. La Cour d’appel a réduit sa peine à un an en . Il a été libéré le même mois.

Les organisations de la société civile et les médias au Burundi ont été parmi les premières cibles de la répression gouvernementale en . Le gouvernement a suspendu ou radié la plupart des organisations de défense des droits humains et médias indépendants et les a contraintes à l’exil. Malgré certaines ouvertures de la part du président Ndayishimiye envers les médias en , le gouvernement burundais continue de considérer avec suspicion le travail en faveur des droits humains, et de sévères restrictions aux droits humains, notamment à la liberté d’expression, sont toujours en place.

La plupart des organisations indépendantes de défense des droits humains n’ont pas pu reprendre leurs activités au Burundi, surtout que les autorités burundaises ont émis des mandats d’arrêt à l’encontre de plusieurs de leurs principaux membres en exil. Douze défenseurs des droits humains et journalistes étaient parmi un groupe de trente-quatre personnes condamnées à l’emprisonnement à perpétuité, en l’absence des accusés, en . Ils étaient accusés d’implication dans une tentative de coup d’état en . Le jugement de la Cour suprême n’a été rendu public qu’en .

Burundi : le Conseil des droits de l’homme devrait poursuivre son examen minutieux de la situation et son travail en faveur de la justice et de la redevabilité

À l’attention des Représentants permanents des États Membres et Observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, Genève (Suisse)

Madame, Monsieur le Représentant permanent,

Lors de la 45ème session du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (ci-après le Conseil), en , le Conseil a renouvelé le mandat de la Commission d’enquête (CoI) sur le Burundi pour une année supplémentaire. Cette décision a permis au seul mécanisme indépendant ayant pour mandat de documenter les violations et atteintes aux droits humains de suivre et de faire rapport publiquement sur la situation au Burundi de poursuivre effectivement son travail. En adoptant la résolution 45/19, le Conseil a reconnu que des évolutions politiques n’équivalent pas à des changements en matière de droits humains et a réaffirmé sa responsabilité de soutenir les victimes et les survivants de violations et de continuer à œuvrer à améliorer la situation dans le pays.

En amont de la 48ème session du Conseil (-), nous vous écrivons afin d’exhorter votre délégation à soutenir les efforts visant à s’assurer que le Conseil poursuive son examen minutieux de la situation et son travail en faveur de la justice et de la redevabilité au Burundi. En l’absence d’améliorations structurelles et à la lumière d’une récente augmentation des violations des droits humains contre les personnes perçues comme des opposants au Gouvernement, nous considérons qu’il n’existe aucune base ni progrès mesurable qui justifieraient un abandon de l’approche actuelle ou un non-renouvellement du mandat de la CoI. Lors de la session prochaine, au minimum, le Conseil devrait adopter une résolution reflétant la réalité du terrain, notamment via les éléments suivants.

Lettre ouverte : l’UE devrait honorer ses engagements en faveur des droits humains au Burundi

Monsieur le Haut Représentant,
Mesdames et messieurs les ministres des Affaires étrangères,

Alors que le Conseil de l’Union européenne (UE) et ses instances préparatoires examinent la situation au Burundi et la politique de l’UE en la matière, les organisations soussignées souhaitent exprimer leur préoccupation sur le fait que l’UE et certains de ses États membres semblent disposés à fermer les yeux sur l’absence de progrès significatifs sur la situation des droits humains et sur l’impunité généralisée pour les atteintes graves aux droits humains passées et continues dans le pays.

Malgré une série d’actes isolés récents du gouvernement burundais concernant les libertés publiques, le Conseil devrait maintenir sa position selon laquelle la progression durable et visible de l’ouverture de l’espace politique et civique et la lutte contre l’impunité sont indispensables pour résoudre les problèmes fondamentaux en matière de droits humains au Burundi. L’UE ne devrait pas se fier aux promesses de réformes liées aux droits humains formulées par les autorités burundaises et devrait plutôt insister pour que celles-ci remplissent des critères concrets attestant de leur engagement à garantir la responsabilisation et à se lancer dans une voie respectueuse des droits humains.

Burundi : Une fois de plus, le droit à un procès équitable du défenseur des droits humains Germain Rukuki est bafoué

Appel aux autorités du Burundi

Nous, les organisations soussignées, exprimons notre consternation quant au fait que la Cour d'appel burundaise de Ntahangwa n'a pas encore annoncé un verdict dans l'affaire du défenseur des droits humains M. Germain Rukuki. Selon les statuts juridiques, ce verdict devait être rendu dans les 30 jours suivant l'audience d'appel, soit avant le . S’ajoutant aux nombreuses irrégularités qui ont caractérisé la procédure judiciaire dans cette affaire depuis l'arrestation de M. Rukuki en , ce retard indu aggrave encore la violation du droit de M. Rukuki à un procès équitable et à une procédure régulière.

Le , la Cour suprême du Burundi a annulé la décision de la Cour d'appel de maintenir la peine de 32 ans dans le cas de M. Rukuki et a ordonné une deuxième audience en appel, citant des violations de son droit à un procès équitable. Cette deuxième audience en appel a eu lieu 8 mois plus tard, le , à la prison de Ngozi, où M. Rukuki est actuellement détenu. Selon le Code de procédure pénale burundais, après l'audience, la Cour a 30 jours pour rendre un verdict sur l'affaire, mais ce verdict est toujours en attente près de 60 jours plus tard. Ce retard démontre l'absence de procédure régulière dans le cas de ce défenseur des droits humains et prisonnier politique internationalement reconnu.

Burundi : Soixante-cinq organisations demandent la libération immédiate des journalistes d’Iwacu

À l’occasion du premier anniversaire de l’arrestation des journalistes d’Iwacu Agnès Ndirubusa, Christine Kamikazi, Egide Harerimana et Térence Mpozenzi, déclarés coupables d’accusations liées à la sûreté de l’État pour avoir simplement fait leur travail, 65 organisations demandent leur libération immédiate et sans condition. Leur détention continue pour des accusations sans fondement rappelle avec force, malgré les récents changements intervenus à la tête du pays, le manque de tolérance du gouvernement burundais en ce qui concerne le journalisme indépendant et la libre expression, ont déclaré les organisations.

Ces quatre journalistes du groupe de presse Iwacu et leur chauffeur, Adolphe Masabarakiza, ont été arrêtés le , alors qu’ils se rendaient dans la province de Bubanza pour enquêter sur des informations faisant état d’affrontements entre les forces de sécurité et un groupe armé. Bien qu’ils aient informé les autorités provinciales de leur projet de se rendre dans la zone, ils ont été arrêtés à leur arrivée et accusés d’atteinte à la sûreté intérieure de l’État. Lors du procès, le ministère public n’a cependant produit aucun élément prouvant que les journalistes avaient été en contact avec le groupe armé.

Burundi : le rôle vital de la Commission d’enquête dans l’optique de progrès concrets en matière de droits humains

À l’attention des Représentants permanents des États Membres et Observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, Genève (Suisse)

Madame, Monsieur le Représentant permanent,

En amont de la 45ème session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU (ci-après « le CDH » ou « le Conseil »), nous, organisations nationales, régionales et internationales de la société civile, vous écrivons afin d’exhorter votre délégation à soutenir le renouvellement du mandat de la Commission d’enquête (CoI, selon l’acronyme anglais, largement utilisé) sur le Burundi. Ce renouvellement, ancré dans les investissements consentis à ce jour dans et par la CoI et dans le contexte des développements politiques récents, fournirait la meilleure occasion de provoquer des progrès concrets en matière de droits humains au Burundi.

À ce jour, la CoI demeure le seul mécanisme indépendant ayant pour mandat de documenter les violations des droits humains (y compris sur leur étendue et sur le point de savoir si elles constituent des crimes de droit international), de suivre et de faire rapport publiquement sur la situation au Burundi, et doté par ailleurs de ressources et d’expérience suffisantes pour le faire. Des réalités politiques mouvantes n’équivalent pas à des changements systémiques en matière de droits humains. Le Conseil conserve une responsabilité de soutenir les victimes et les survivants des violations et d’œuvrer à améliorer la situation au Burundi.